
Des familles abandonnées
Après la cérémonie solennelle de 1968, en présence du chef de l’état, les familles n’allaient jamais recevoir la moindre information au sujet de la Minerve. Les mères, les pères, les sœurs, les frères les épouses et les enfants resteront dans l'ignorance de ce qui a pu causer la disparition de leur proche.
Nulle assistance psychologique ne leur sera proposée malgré les traumatismes et de nouveaux drames.
Beaucoup de familles seront brisées, ou meurtries bien après le drame.
Certains proches porteront un deuil éternel, lourd comme une chape de plomb, étouffant pour ceux qui les entourent.
Des conflits profonds éloigneront les jeunes veuves, désireuses de reconstruire leur vie, des familles de leurs défunts maris, acharnées à préserver la mémoire du disparu en les enfermant dans un veuvage sans fin. Les liens entre les enfants des disparus et leurs grands-parents se verront coupés, irrémédiablement et parfois définitivement.
Des rancœurs naîtront à l’encontre de ceux qui, de près ou de loin, furent perçus comme responsables de l’engagement du marin disparu dans les sous-marins. Lorsque ce "coupable" était un parent proche, la douleur se changeait en fracture familiale, profonde et silencieuse.
Des querelles, parfois tenaces, finiront par disperser des fratries autrefois soudées.
Certains proches, qu’ils soient parents ou non, sombreront dans le désespoir, allant jusqu’à mettre fin à leurs jours pendant que d'autres se perdront dans les méandres de l’alcoolisme.
Des jeunes veuves ou des fiancées, égarées dans leur solitude, se jetteront dans les bras des premiers venus, pour s’unir à des hommes avec lesquels elles ne connaîtront pas le bonheur.
Quant aux compagnes enceintes mais non reconnues, elles se hâteront d’épouser un autre pour donner un nom à l’enfant à naître, lequel grandira dans l’ombre du silence, ignorant tout du destin tragique de son véritable père.
Sur les causes du drame
Le dossier "Minerve" était automatiquement couvert par le "Secret Défense" comme chaque fois qu'il y a un accident militaire.
Au nom de ce secret défense, le seul moyen d'avoir une idée de ce qui avait pu se passer sera de consulter deux numéros de la revue maritime, éditée sous le contrôle de la Marine Nationale.
Vous pouvez la télécharger sur cette page.
Cette publication était confidentielle et très peu de famille en eurent connaissance. Même les journalistes l'ignoreront.
Sur le plan administratif
Sur ce plan il n'y eu pas de problème, la disparition des marins fut officiellement constatée par un jugement du tribunal du 22 mars 1968, ce qui peut être considéré comme rapide. Cela permit aux familles d'éviter les tourments administratifs souvent liés aux disparitions.
Les enfants légitimes des marins eurent droit à une pension d'éducation, mais pas au statut de pupille de la nation. Les enfants nés hors mariage, au minimum de 2, n'eurent droit à rien.
Plaques mémorielles sur les monuments
La plupart des autres demandes d'inscription sur les monuments aux morts furent déboutées, car ils n'étaient pas "Mort pour la France".
Ce n'est que depuis l'attentat de Karachi du 8 mai 2022 que les noms des personnes mortes au service de la France peuvent figurer sur les monuments au mort. Mais la loi qui l'autorise n'est pas rétroactive et ne couvre pas 1968.
Depuis 2013, de telles demandes pourraient aboutir mais c'est quand même aux familles de faire une démarche en ce sens.
Après 1970 et la disparition de l'Eurydice 2 stèles commémoratives à la mémoire des équipages des 4 sous-marins disparus au large des côtes varoises, le SM2326, la Sybille, la Minerve et l'Eurydice furent érigée. L'une dans l'église de Ramatuelle, l'autre dans le jardin du sémaphore de Camarat.
Il faudra attendre 2009 et l'inauguration du Monument National des Sous-Mariniers à Toulon pour que tous les membres de l'équipage aient leur nom gravé sur un monument. Voir ICI
Depuis la découverte de l'épave la situation a pu se débloquer comme vous pouvez le voir en allant sur la page "Commémorations".

