Discours d'Hubert Falco
au nom de la Ville de Toulon
Monsieur le Préfet Maritime,
Messieurs et mesdames les familles et proches,
Mesdames, Messieurs,
Je crois que toutes les Varoises et tous les Varois de ma génération se souviennent de ce qu’ils étaient en train de faire au moment où ils ont appris par la radio, dans la matinée du dimanche 28 janvier 1968 que le sous-marin La Minerve avait disparu la veille au matin, au large de Toulon, avec 52 hommes à bord.
Je me rappelle du choc, de l’effroi, de la sidération, de la tristesse de la France entière, tristesse que le Général de Gaulle est venu exprimer à Toulon le 8 février 1968…
Ce 27 janvier 1968, la France a perdu 52 de ses fils parmi les meilleurs. La Marine nationale a perdu 52 sous-mariniers, 52 militaires d’élite, qui avaient choisi volontairement cette carrière si particulière de sous-mariniers.
Ce 27 janvier 1968, 52 familles ont vu leur vie se désintégrer dans la douleur et le chagrin.
Perdre un être cher, un fils, un père, un époux dans des circonstances aussi dramatiques, c’est une épreuve terrible, mais lorsque de surcroît, l’absence de toute information empêche le travail de deuil, la peine devient trop forte pour être exprimée…
Les recherches pour localiser l’épave, juste après le naufrage ayant échoué, je peux imaginer que les personnes touchées dans leur chair par ce drame n’ont jamais pu trouver la paix jusqu’à ce jour.
J’ai d’ailleurs été touché par l’extrême douleur exprimée par les familles présentes, le 27 janvier 2018, lors de la cérémonie du 50ème anniversaire du naufrage de la Minerve. A leur côté, j’ai ressenti profondément le sens du questionnement, le besoin de réponse, la nécessité d’une sépulture.
Aussi, lorsque le fils du lieutenant de vaisseau André FAUVE, commandant de la Minerve, m’a contacté quelques mois plus tard pour m’expliquer que les progrès technologiques en océanographie et en géolocalisation marine ouvraient de nouveaux espoirs pour retrouver le sous-marin d’attaque abîmé au large de Toulon, j’ai immédiatement relayé auprès du ministre des Armées, Madame Florence PARLY, le souhait des familles de voir reprendre les recherches.
Je la remercie d’ailleurs d’avoir entendu cet appel, tout comme elle a également entendu celui du vice-amiral d’escadre Charles Henri Leulier de La Faverie du Ché, alors Préfet Maritime de la Méditerranée.
L’Amiral du Ché, je connais son humanisme et son attachement à ses hommes. Je sais qu’il n’a jamais renoncé à l’espoir d’apporter aux familles des marins disparus le réconfort que représente la localisation de l’épave. Il savait toute l’importance de cette sépulture marine.
L’amiral Préfet Maritime connaît mieux que quiconque l’engagement moral, le dévouement et le sens de la Patrie du corps des sous-mariniers. Il est l’un des leurs.
On ne devient pas sous-marinier par hasard, on choisit d’être sous-marinier. Il faut avoir un mental d’acier et une endurance physique hors du commun pour embrasser cette carrière. Quelle que soit sa place et son rôle sur le navire, chaque homme à bord accepte de vivre « différemment », au service de la France…
A 300m de profondeur, dans un espace exigu qu’il faut savoir partager et optimiser, tout prend une dimension particulière et seuls des marins d’exception peuvent supporter ces conditions de vie et d’exercice. Le corps des sous-mariniers est un corps d’élite.
Ces 52 sous-mariniers disparus en service commandé avec leur bâtiment, ces marins morts pour la France, représentaient l’élite de notre Marine nationale.
Aussi, au nom du sacrifice qu’ils ont consenti pour la France, à une époque ou les progrès technologiques rendent désormais réalisables les missions impossibles d’hier, il aurait été inconcevable de ne pas mettre la science au service de notre devoir de mémoire.
Il était du devoir de tous de reprendre les recherches afin de retrouver l’épave de la Minerve et d’honorer dignement la mémoire de son équipage.
Il était de notre devoir à tous d’apporter enfin des réponses aux familles de ces marins qui ont fait don de leur vie à la France !
Ils vont pouvoir désormais reposer en paix et leurs familles vont pouvoir enfin, mener leur éprouvant travail de deuil.
Nous n’avons jamais oublié les marins de la Minerve, leurs 52 noms sont gravés dans la pierre du Monument National des Sous-Mariniers disparus, dans les jardins de la Tour Royale, (monument que j’ai inauguré en tant que ministre le 28 novembre 2009), mais désormais, ils ont une sépulture identifiée et reconnue.
Que la Méditerranée veille sur le repos de ces marins qui sont à jamais dans nos cœurs et dans nos mémoires.
Qu’ils reposent en paix.
Hubert FALCO
Maire de TOULON
Ancien ministre